
Magazine Beaux Quartiers,
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GALERIE ALTER-ART
Un jardin, le sien. Philippe Clerc l'a parcouru durant le confinement, muni d'un boitier hybride Olympus équipé d'un petit zoom. Loin d'une énumération botanique ses photographies de format carré, en noir et blanc, sont une pérégrination au plus près, centrée sur les textures végétales afin d'en révéler l'essence.
Le noir et blanc, est-ce éteindre la couleur? Bien sûr que non, Philippe Clerc en fait l'éclatante démonstration. Le noir et blanc, ce n'est ni ajouter, ni retrancher, c'est une mise en perspective qui privilégie le contraste, ses valeurs, mais aussi la puissance, la profondeur des formes, avec élégance et rigueur. Le regard se pose sur l'éclat de la ligne, de la courbe, des plans et des espaces, s'éloignant du connu pour saisir d'autres résonances qui, si elles semblent plus abstraites, n'en sont que plus sensibles. Il ne s'agit plus là d'identifier le sujet, ceci est une pivoine, ceci est une tulipe, mais de pénétrer avec le photographe dans l'intime du végétal, l'enjeu n'est pas la reconnaissance du sujet mais la découverte de son intériorité, sa palpitation.
Regarder les photographies de Philippe Clerc est une expérience tactile, l'œil s'immisce parmi les textures. Ses images sont le réceptacle de l'harmonie et de l'architecture végétale, de l'éphémère en suspens. Il saisit l'anatomie du réel, l'élancé, le recroquevillé, le plissé, le fléchi, l'enroulé, le moussu. Le moment de la prise de vue n'est pas identifiable, jour naissant ou finissant, peu importe, l'instant choisi par Philippe Clerc est celui d'une clarté particulière sur le sujet, éclatante, timide, caressante, audacieuse, dans la mouvance de l'infinité de ses nuances, un instant pour fixer un noir et blanc somptueux.
« Un jardin » est l'allégorie du déploiement, des croissances, des épanouissements, des flétrissements, une fenêtre ouverte sur un mystère, le vivant. Bien que sa modestie puisse en souffrir Philippe Clerc est un photographe rare.
Jean-Luc Didier